C’est ce qu’on appelle une patrouille en roue libre. Alors que le ministère de l’Intérieur s’apprête à verdir le parc automobile de la police, de la gendarmerie et des douanes grâce au bioéthanol, Bercy, lui, prépare déjà le coup de frein fiscal. Oui, les forces de l’ordre vont bientôt traquer les chauffards au Superéthanol E85… pendant que l’État augmente la taxe sur ce même carburant. On appelle ça la cohérence à la française.
Un projet pourtant séduisant sur le papier
40 000 véhicules de sécurité intérieure (et peut-être jusqu’à 54 000) vont être équipés d’un boîtier de conversion E85, fourni par la société Flexfuel Energy Développement. Ce dispositif permet de rouler au bioéthanol, un carburant plus propre – 50 % d’émissions de CO₂ en moins – et surtout plus doux pour le portefeuille : à peine 0,70 € le litre à la pompe. De quoi réaliser, selon les calculs officiels, près de 28 millions d’euros d’économies par an pour l’État.
La mesure bloque sur la taxe
Mais c’était sans compter sur la fameuse “main gauche de Bercy”, qui ignore souvent ce que fait la “main droite de Beauvau”. Dans le projet de loi de Finances 2026, le gouvernement prévoit en effet de réduire les avantages fiscaux du bioéthanol. Résultat : le litre passerait de 0,70 € à 1,20 €. Autant dire que les économies promises partiraient aussi vite que les Alpine de la Gendarmerie sur l’A7.
Le paradoxe est total : l’État investit dans une conversion verte qu’il s’apprête lui-même à rendre moins rentable. Une situation ubuesque qui illustre, une fois encore, l’art bien français de l’auto-sabotage administratif.
En attendant, les gendarmes testés en région PACA depuis deux ans semblent satisfaits : leurs véhicules tournent rond et sentent bon la betterave.