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Vers une super police municipale avec des compétences accrues. C’est le sens de l’ambitieux projet de loi Retailleau  

Des policiers de la police Municipale Le Mans Sarthe France 14 Juin 2019//07GILEMICHEL_11203702/1906191138/Credit:GILE MICHEL/SIPA/1906191140

Le gouvernement français, sous l’impulsion du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau et de son collègue François-Noël Buffet, prépare un ambitieux projet de loi intitulé « Projet de loi relatif à l’extension des compétences des polices municipales et des gardes champêtres ». Ce texte, dont le Figaro a pris connaissance, s’inscrit dans un contexte de pression croissante sur les forces de l’ordre nationales. Il entend transformer en profondeur le rôle des polices municipales en leur conférant de nouvelles compétences judiciaires, des outils technologiques élargis et un cadre d’action plus structuré.

Vers une “super police municipale”

Au cœur du projet se trouve la création de services de police municipale à compétence judiciaire élargie. Il s’agit d’un changement de paradigme : certaines polices municipales, sous conditions, pourront exercer des missions jusqu’ici réservées à la police nationale et à la gendarmerie. Ces nouvelles attributions ne seront toutefois accessibles qu’aux communes suffisamment dotées en personnel et après la signature d’une convention de coordination avec le préfet et le procureur. La supervision judiciaire sera rigoureuse : le procureur général pourra retirer ou suspendre l’habilitation des agents, et les chefs de service seront notés par la justice sur leurs missions judiciaires.

Des prérogatives élargies mais encadrées

Les agents municipaux, et en particulier les cadres habilités, pourront désormais :

  • Mettre des véhicules en fourrière pour des infractions graves
  • Constater l’état d’imprégnation alcoolique d’un conducteur
  • Dresser des procès-verbaux de destruction d’objets remis volontairement
  • Accéder, copier et transmettre aux autorités compétentes les images des systèmes de vidéoprotection
  • Mettre en œuvre, sur instruction du procureur, des rappels à la loi ou des orientations vers des dispositifs éducatifs et sociaux (stages de citoyenneté, structures de soin, etc.)

Toutefois, le projet précise clairement que les policiers municipaux ne mèneront pas d’enquêtes judiciaires. Leur rôle reste centré sur le constat d’infractions visibles, sans procédure d’investigation complexe.

Infractions concernées et constatables

La liste des infractions que les policiers municipaux pourront désormais verbaliser s’étend largement : vente à la sauvette, vols simples, tags, troubles à la circulation, conduite avec permis annulé, usage de stupéfiants, outrage sexiste, occupation illicite de halls d’immeubles, vente d’alcool aux mineurs… Ces agents pourront même se voir remettre les objets liés aux délits constatés (par exemple, une barrette de cannabis ou une bouteille d’alcool).

Le texte assouplit aussi les règles de vérification d’identité. Jusqu’ici, les policiers municipaux devaient attendre l’intervention des forces nationales pour amener une personne au commissariat en cas de refus de décliner son identité. Le projet prévoit de leur offrir davantage de marge de manœuvre dans ce domaine, même si les modalités exactes restent à débattre au Parlement.

Des outils technologiques modernes

Le projet introduit également une expérimentation encadrée sur cinq ans de l’usage des drones par les polices municipales. Ces dispositifs ne pourront être utilisés que dans des conditions strictes : prévention des troubles à l’ordre public, sécurité des manifestations ou des bâtiments publics, secours aux personnes, ou encore surveillance environnementale. Ils ne devront jamais filmer l’intérieur des domiciles ni leurs abords immédiats.

Par ailleurs, les caméras-piétons deviendront accessibles aux gardes champêtres, un corps restreint mais actif dans les zones rurales. Ces caméras devront être apparentes, signalées, et utilisées dans un cadre transparent. L’objectif est de renforcer à la fois la protection des agents et la confiance du public.

Formation, fichiers, transparence

Le gouvernement prévoit également des efforts de formation, de mutualisation entre communes et d’accès élargi à certains fichiers, notamment le fichier des permis de conduire, afin de renforcer l’efficacité des interventions. Un accent est mis sur la transparence : chaque agent se verra attribuer un numéro d’identification (RIO), visible sur l’uniforme et enregistré dans une base nationale, comme c’est déjà le cas dans la police nationale.

Une volonté d’efficacité locale et de recentrage de l’État

Ce texte vise à donner aux communes les moyens d’agir plus efficacement face à la montée des incivilités, tout en laissant aux élus la liberté d’en faire usage ou non. Le gouvernement affirme respecter la libre administration des collectivités territoriales, un principe défendu fermement par des élus comme David Lisnard, président de l’Association des maires de France. Celui-ci a rappelé que « c’est celui qui paie qui administre » et s’oppose à une mainmise indirecte de l’État sur les ressources locales.

Vers une police de proximité renforcée

Dans un contexte de stagnation des effectifs nationaux et de tensions croissantes sur la sécurité publique, l’État entend redéployer ses forces en misant sur une police municipale de proximité, mieux armée, mieux formée, et juridiquement renforcée. Ce projet marque un tournant stratégique dans l’organisation de la sécurité publique française, en instaurant une nouvelle coopération entre communes, préfectures et justice, tout en adaptant les outils aux réalités du terrain.

Rédigé par pandore

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