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La France condamnée par la CEDH pour un contrôle d’identité « au faciès » : une rareté

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la France, ce jeudi 26 juin, pour discrimination lors de contrôles d’identité, dans une décision inédite. Cette condamnation fait suite au cas de Karim Touil, un Français d’origine nord-africaine, qui avait été contrôlé à trois reprises en seulement dix jours à Besançon, en 2011. La CEDH a estimé qu’il n’existait pas de « justification objective et raisonnable » pour ces contrôles et a reconnu une « présomption de traitement discriminatoire » à son encontre, que le gouvernement français n’a pas su contredire. L’État a ainsi été condamné pour violation de l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif à l’interdiction de la discrimination, combiné avec l’article 8 sur le droit au respect de la vie privée et familiale. Il devra verser 3 000 euros à M. Touil en réparation du préjudice moral.

D’autres requêtes rejetées

En revanche, la Cour a rejeté les requêtes de cinq autres Français d’origine africaine ou nord-africaine, résidant à Roubaix, Marseille, Vaulx-en-Velin, Saint-Ouen et Besançon. Ces derniers dénonçaient eux aussi des contrôles discriminatoires subis entre 2011 et 2012. La CEDH n’a pas considéré que les preuves apportées dans leurs cas démontraient une discrimination. De plus, la Cour a écarté l’existence d’une « défaillance structurelle » du système français, ce qui signifie qu’elle ne considère pas les contrôles au faciès comme un problème systémique en France. Toutefois, elle a reconnu que ces pratiques discriminatoires ne sont pas de simples cas isolés.

Un long processus judiciaire

Cette décision marque l’épilogue d’un long combat judiciaire initié il y a plus de dix ans. En effet, ces six hommes faisaient partie d’un groupe de treize requérants ayant dénoncé des contrôles jugés injustifiés, souvent accompagnés de palpations, d’insultes ou de tutoiement. Après un premier échec devant la justice française en 2013, cinq plaignants avaient obtenu gain de cause en appel en 2015, avec une indemnisation de 1 500 euros chacun. La Cour de cassation avait ensuite confirmé cette décision pour trois d’entre eux en 2016. Les six autres avaient alors décidé de saisir la CEDH en 2017.

Un contexte sensible

Cette affaire s’inscrit dans un contexte de forte augmentation des contrôles d’identité en France. Selon une enquête récente du Défenseur des droits, entre 2016 et 2024, la proportion de personnes contrôlées au moins une fois par la police ou la gendarmerie est passée de 16 % à 26 %. Toujours selon l’enquête, les jeunes hommes perçus comme arabes, noirs ou maghrébins sont particulièrement ciblés, avec un risque quatre fois plus élevé d’être contrôlés et douze fois plus de subir un contrôle approfondi. Cette décision de la CEDH pourrait ainsi relancer le débat sur la lutte contre les contrôles discriminatoires en France.

Rédigé par pandore

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